« Benedetta »
Terminé depuis plus de deux ans, « Benedetta » devait être présenté au festival de Cannes en 2019, mais le cinéaste, malade, avait préféré reporter sa projection d’un an... sans savoir que l’édition 2020 allait être purement annulée en raison de la pandémie. Puisqu’il n’était pas question pour lui de sortir son film sans passer par la case festival de Cannes, ce n’est que cette année que le film peut, enfin, prétendre à une sortie. C’est dire si le film s’est fait attendre !
On vous le dit tout de go : sur ce blog, on est fan de Paul Verhoeven depuis bien longtemps et cette histoire de « Benedetta » était incontestablement créée pour que lui seul puisse la transférer sur grand écran.
La religion et le sexe ont toujours fasciné le réalisateur de « Basic instinct » alors forcément une histoire de nonne lesbienne ne pouvait que lui plaire. Comme prévu, le cinéaste ne donne aucune limite à son film qui alterne les scènes de sexe crues et séquences sanguinaires sans ménager les spectateurs. Provocateur pour les uns, réaliste pour les autres, « Benedetta » n’échappe pas à la tradition des films phares du cinéaste. Certainement que des spectateurs vont se poser la question de l’utilité de certaines scènes. Était-ce utile d’aller aussi loin ? Les scènes de sexe sont-elles du voyeurisme gratuit ? Est-il acceptable de voir Benedetta utiliser une effigie de la Vierge Marie comme objet sexuel ? Il y a matière à laisser perplexe plus d’un spectateur. Ou pas. Car, après tout, sa présentation cannoise n’a, semble t’il, pas provoqué le scandale qu’il semblait espérer. Comme si le public de 2021 était rodé face à ce genre de provocation qui, peut être, est désormais obsolète. Dépassé Verhoeven ? Has been ? Non certainement pas. Un autre cinéaste que lui n’aurait pas apporté cette adrénaline qui construit le film et lui donne la noirceur qui est sienne.
On ne saurait nier que l’ambiance décrétée par le film est certainement très proche de la réalité de l’époque. Verhoeven la retranscrit fidèlement.
Et puis, une nouvelle fois, il obtient le meilleur de ses acteurs qui savent, en signant avec lui, que le cinéaste va leur demander d’aller loin. A ce titre il obtient le meilleur de Charlotte Rampling, Lambert Wilson, Louise Chevillotte... pour ne citer qu’eux qui entourent le « couple phare » composé d’une nouvelle venue, Daphné Patakia, et de Virginie Efira. La première est la révélation incontestable du film tandis que la deuxième, dans le rôle titre, obtient ici,peut-être, le rôle de sa vie. Totalement investie dans son personnage, Virginie Efira ne se donne aucune limite et se voue totalement à son cinéaste qui ne l’épargne pas à travers des scènes hautement suggestives.
On peut, cependant, légitimement regretter un maquillage trop appuyé de l’actrice dans bon nombre de scènes qui ne colle pas avec le personnage qu’elle interprète. Une nonne du 17ème siècle avec un rouge à lèvres bien voyant cela donne une impression curieuse.
Autre erreur notable : la belle Virginie a cru bon de se forger un magnifique corps en vue de préparer les nombreuses scènes de nu. Certes elle est très agréable à regarder dans la tenue d’Eve. Mais ce corps 2021 n’a aucune crédibilité d’être celui, là encore, d’une bonne sœur d’il y a 300 ans. On chipote ? Peut-être. Mais quand on voit le mal que Verhoeven s’est donné pour retranscrire une époque notamment ravagée par la peste, on peut déplorer qu’il ait laissé son actrice vedette donner l’impression d’avoir une petite retenue dans ce qu’elle était prête à montrer d’elle même.
Autre petit dysfonctionnement notable : il y a, finalement, deux histoires qui se juxtaposent concernant Benedetta.Tout d’abord, sa conviction personnelle d’être l’élue de Jésus, poussant celle ci dans des délires qui ne sont pas sans rappeler ceux de l’héroïne de « L’exorciste » (à la différence qu’ils étaient supposément vrais et non des simulacres comme ici). Ensuite son histoire d’amour avec une autre sœur. Les deux histoires entremêlées ne fonctionnent pas toujours très bien dans leurs alternances. Tant est si bien qu’à l’arrivée, « Benedetta » n’est peut être pas le grand film qu’il aurait pu être. Un très bon film mais pas LE film de Paul Verhoeven.
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