Pour une poignée de 7e art (par Indy Blave)

Pour une poignée de 7e art (par Indy Blave)

« Emilia Pérez »

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Sur le papier, cela ferait presque synopsis de série Z. Pensez donc : un narco trafiquant mexicain veut tout laisser tomber, business et famille, pour devenir une femme. Entre des mains peu expertes un tel sujet tomberait dans les sphères du navet ultime faisant, malgré tout, la joie des amateurs du style.

 

Sauf que c’est Jacques Audiard qui porte le sujet. Et là cela change tout. D’un synopsis casse gueule, le réalisateur de « De battre mon cœur s’est arrêté » nous concocte une œuvre d’art que vous n’êtes pas prêt d’oublier.

 

Histoire, peut être, de s’auto-challenger davantage, Audiard a construit son film en mode film musical. Mais le résultat est, à l’écran, ébouriffant : les chorégraphies sont sublimes, renforcées par la musique géniale de Camille et Clément Ducol, l’intrigue est prenante d’un bout à l’autre avec son lot de rebondissements auxquels on ne s’attend pas. Malgré la dramaturgie de l’ensemble, le cinéaste n’oublie jamais l’humour bien trouvé pour alléger quelque peu l’ensemble de l’histoire.

 

On pourrait aussi évoquer, pendant des lignes, la beauté de la photo, les trouvailles de mise en scène, la beauté des décors…

 

Mais il n’est pas possible de ne pas évoquer celles sans qui ce film n’aurait pas le même impact : Zoe Saldaña trouve tout simplement ici le meilleur rôle de sa carrière. Elle est bluffante d’un bout à l’autre, se mettant littéralement à nu pour un rôle où elle s’est investie à fond, notamment dans les séquences musicales. En un film, elle postule pour figurer parmi les grandes du métier. Face à elle la révélation du film, Karla Sofia Gascón, explose littéralement dans un rôle fort, puissant. L’actrice sublime le film de sa présence en y insufflant un énorme potentiel qui devrait nous permettre de la revoir rapidement. Entre les deux, telle une arbitre, Selena Gomez se voit elle aussi offrir un rôle en or. Elle peut remercier Audiard pour ce personnage haut en couleur qui nous fait comprendre qu’elle a un talent certain jusque là bien mal exploité.

 

Ces trois là n’ont pas volé leur prix d’interprétation commun à Cannes amplement mérité.

 

Sans faire offense au film de Sean Baker, « Anora », que nous n’avons pas encore vu ici, il nous paraît étonnant qu’Audiard ne soit pas reparti avec la Palme d’or avec son nouveau film.

 

Aucun reproche au film ? Allez en titillant un peu, on pourra se désoler que Audiard ait sorti sa carte de bobo gaucho au gré de deux scènes : la première où Zoe Saldaña fustige, face caméra, le public réfractaire aux personnes trans ne laissant aucun doute sur le côté reac de celui-ci. La deuxième est la scène finale dont la morale peut paraître discutable…

 

Cela nous empêche pas ici de penser que le film flirte avec le chef d’œuvre. Et on ne l’écrit pas souvent.

 



21/08/2024
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